LA VILLE MONDIALE
un concept moderne

La ville mondiale

Le triangle mégalopolitain mondial

Un nouveau système urbain ?

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1. Quelles sont les très
grandes villes ?

2. Quel est le poids
des très grandes villes ?

3. Où sont les très grandes villes ?

4. Une brève incursion dans le futur

 

Carte des villes mondiales

Evolution démographique des principales villes mondiales


1. Quelles sont les très grandes villes ?

La définition des agglomérations, et en conséquence l'estimation de leur population, s'avère généralement difficile puisqu'il n'existe pas de critères uniformes à l'échelle mondiale. Ainsi, on peut parvenir à des résultats parfois fort différents, comme le montre ce tableau. Selon H. Théry et S. Vélut, il y avait, en juin 2000, 173 villes de plus de deux millions d'habitants, et 378 villes de plus d'un million d'habitants.

Les dix premières villes du monde selon différentes sources
Source : Thomas Brinkhoff
Source : Atlas Universel
rang
ville
population
rang
ville
population
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Tokyo
New York
Séoul
Mexico
São Paulo
Bombay
Osaka
Los Angeles
Le Caire
Manille
34 750 000
20 250 000
19 850 000
19 750 000
17 900 000
17 850 000
17 800 000
16 150 000
14 350 000
13 450 000
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Tokyo
Mexico
Bombay
São Paulo
New York
Shangai
Lagos
Los Angeles
Calcutta
Buenos Aires
28 025 000
18 131 000
18 040 000
17 711 000
16 626 000
14 173 000
13 488 000
13 129 000
12 900 000
12 431 000

Vers le détail des plus grandes villes mondiales
selon Thomas Brinkhoff

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2. Quel est le poids des très grandes villes ?

Les villes millionnaires rassemblent 1,160 milliard d'habitants, et celles de plus de deux millions d'habitants 882 millions, soit près d'un habitant de la planète sur sept. Les 173 villes concernées, si elles sont réparties sur tous les continents, ne le sont pas également. Si l'on s'en tient un instant à l'échelle nationale, vingt pays dans le monde en comptent plus de trois : à eux tous, ils en possèdent 108, qui regroupent près de 600 millions de citadins.

Les vingt pays comptant plus de trois très grandes villes
nom
Nombre de villes de plus de 2 millions d'habitants
Population totale(millions)
Part des grandes villes dans la population urbaine (%)
Etats-Unis
Chine
Inde
Brésil
Japon
Pakistan
Indonésie
Royaume-Uni
Allemagne
Mexique
Corée du Sud
Turquie
Colombie
Taiwan
Canada
Italie
Ukraine
Total
23
20
13
8
4
4
4
4
4
3
3
3
3
3
3
3
3
108
124
83
80
48
60
23
20
19
15
27
27
16
14
13
10
10
8
597
47,81
7,08
8,89
31,55
47,96
19,04
10,71
32,67
19,01
30,55
9,42
26,28
40,11
60,53
37,01
17,47
14,42

Les Etats-Unis à eux seuls comptent 23 villes de plus de deux millions d'habitants, mais la Chine et l'Inde, pays réputés peu urbanisés, viennent juste derrière avec 20 et 13 villes, rassemblant dans les deux cas plus de 80 millions de personnes. On notera que les pays industrialisés d'Europe et d'Amérique du nord sont bien minoritaires sur cette liste alors que les pays " du Sud " y sont en force, dont certains que l'on ne s'attendait guère à voir figurer.

Dans la population totale des nations, les très grandes villes ne pèsent pas partout le même poids : même très grandes, les grandes villes de Chine et d'Inde se perdent quelque peu dans la masse de la population (respectivement 7 et 9%), bien qu'elles regroupent ensemble plus de 80 millions de personnes. Au contraire, en Europe elles rassemblent entre 15 et 35% de la population et, en Amérique, du Nord comme du Sud, elles représentent souvent plus de la moitié des habitants du pays. Cette inégalité est à mettre en rapport avec les densités de peuplement, et notamment de peuplement rural, beaucoup plus fortes en Asie qu'en Europe et plus encore qu'en Amérique, ce qui rend plus remarquable encore le cas du Japon, de la Corée du Sud et de Taiwan, où sont associées fortes densités et forte métropolisation. Inversement, l'Afrique associe, sauf exception, basses densités et modestes scores urbains. Ces différences renvoient aux caractéristiques propres des réseaux urbains nationaux et, par conséquent, à la localisation à l'échelle de la planète, de l'ensemble des grandes villes.

D'autres graphiques ...

 

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3. Où sont les très grandes villes ?

La carte de l'ensemble des grandes villes montre des inégalités de répartition relevant d'un processus historique à long terme de diffusion du fait urbain dans le monde et d'une évolution plus récente de gonflement des métropoles.

Si l'on oublie temporairement les limites nationales pour tenter de repérer des amas plus amples, on est frappé par le fait que ces villes forment quelques nébuleuses. L'Europe et le Proche-Orient alignent, sur la rive nord de la Méditerranée, le plus grand ensemble de grandes villes au monde, reflet de l'ancienneté et de la vivacité des plus anciens foyers urbains connus, alors que la rive méridionale, Le Caire excepté, n'a pas la même densité de d'établissements urbains. L'Asie, l'autre foyer originel de la vie urbaine, offre une configuration semblable mais inversée, un arc méridional qui rassemble les foyers urbains de la vallée du Gange et des deux rives de la mer de Chine, au Japon et en Chine maritime.

Hors de ces foyers anciens, l'expansion européenne a dessiné des répliques de ce même système, où une périphérie dense s'oppose à un centre vide. Les mégalopoles américaines s'alignent sur des fragments d'un " beignet " (dough-nut) dont le centre vide correspond à des espaces de très faible densité, grandes prairies et forêt amazonienne. Peuplé pour l'essentiel par des immigrants venus d'outre-mer, le Nouveau Monde a été peuplé de l'extérieur vers l'intérieur, un processus qui n 'est pas partout achevé : en Amérique du Nord, le Middle West compte déjà de belles concentrations urbaines, mais un grand vide urbain s'étend encore entre les Rocheuses et l'axe Mississipi-Grands Lacs. En Amérique latine, la tentative de conquête du cœur du continent qu'a été Brasilia n'a pas encore eu d'effets visibles à cette échelle.

Le même dispositif se répète en Océanie, où les vides correspondent également à des zones peu attractives pour la colonisation européenne, comme le désert australien, et les villes se concentrent dans des régions déjà peuplées, en Malaisie et Indonésie (plus généralement classées aujourd'hui en Asie du Sud-Est), ou favorables à la mise en valeur coloniale, dans le Sud-Est de l'Australie. En Afrique subsaharienne, le cœur vide du continent n'a fait l'objet que de peu de tentatives coloniales et urbaines , celle du roi des Belges par exemple, dont Kinshasa, l'ex-Léopoldville est l'héritage. Ici encore, les tronçons vides et pleins de la périphérie correspondent pour les uns aux déserts, pour les autres aux côtes privilégiées par les ressources (naturelles et humaines) à exploiter, l'orientale l'étant depuis plus longtemps que l'occidentale qui n'offre qu'une pauvre réplique, sur le golfe de Guinée, aux établissements anciens de la façade de l'Océan Indien.

Cette répartition diffère assez peu de celle des villes de plus d'un million d'habitants. Ce n'est qu'en Russie, dont les métropoles se trouvaient déjà à la périphérie du foyer européen, qu'on en trouve un nombre significatif dans l'intérieur du continent, où elles témoignent de l'avancée pionnière vers la Sibérie. Autrement dit, la localisation des agglomérations répond bien plus au principe selon lequel la ville attire la ville qu'à une logique d'équi-répartition ou de maillage régulier des espaces.

En revanche, c'est la croissance récente des grandes métropoles qui est le fait marquant des dernières décennies, conduisant à la formation de villes plusieurs fois millionnaires, jusqu'aux agglomérations géantes de Tokyo et de Los Angeles, " métropoles du futur " (Mike Davis) se faisant face de part et d'autre du Pacifique. Quelle que soit l'importance de la croissance urbaine dans les pays du Sud, nombreuses sont les grandes villes des pays du Nord où elles dessinent des réseaux plus complets, présentant davantage de niveaux hiérarchisés que dans les pays du Sud où, bien souvent, une très grande ville domine sans partage.

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4. Une brève incursion dans le futur

Dans un quart de siècle, 60% de la population mondiale vivra en milieu urbain. Quel sera le visage des grandes cités ?

Nous voilà en 2015. Avec près de 25 millions d'habitants, Lagos (Nigeria) est devenue la plus grande ville d'Afrique, devant Le Caire (Egypte). Tokyo (Japon), 29 millions d'habitants, reste en tête du palmarès mondial des mégapoles, suivie de Bombay (Inde), 26 millions. Sur le continent américain, São Paulo (Brésil) rassemble 20 millions d'habitants. L'explosion démographique des villes, largement amorcée au XXe siècle, se prolonge au XXIe. Onze agglomérations comptaient plus d'un million d'habitants en 1900 et, selon l'ONU, il y en aura plusieurs centaines en 2025 : 60% de la population mondiale vivra alors en milieu urbain, contre un peu moins de la moitié aujourd'hui. Dans les pays en développement, des cités quasi inexistantes à la veille de la Seconde Guerre mondiale sont en passe d'intégrer le club des plus grosses capitales du monde.

Mais il y a des villes, et des "supervilles", qui ne se définissent pas seulement par leur démographie. En 1961, le géographe français Jean Gottmann leur donne un nom en publiant Megalopolis (1). Il décrit ce gigantesque ensemble urbain long de 700 kilomètres qui, sur la côte Est des Etats-Unis, court de Boston à Washington via New York et Philadelphie. Les villes centres s'approprient le milieu rural qui les entoure par cercles concentriques successifs, suivant des règles d'expansion rigoureuses. Les villes ne sont plus seulement une entité administrative. Sur la côte Ouest, l'axe Los AngelesSan Diego s'impose comme un puissant centre d'affaires. Sur tous les continents, le siècle finissant est celui de l'expansion des villes, en Amérique latine (Mexico, São Paulo, Buenos Aires) comme en Asie (Tokyo, Shanghai, Séoul, Bombay). Dans le monde occidental comme dans les pays en développement, cette emprise croissante de la ville qui vampirise les espaces vides à sa portée apparaît comme une menace, d'autant que partout se pose la question de la gestion de ces "mégacités", avec son cortège de problèmes non ou mal résolus en matière d'environnement, de cohésion sociale, d'infrastructures (déchets, égouts) ou de transports.

Qu'en sera-t-il au XXIe siècle ? En termes de population, la croissance démographique marquera sans doute une pause dans une expansion jadis considérée comme inéluctable. Mexico, que les démographes, dans les années 80, voyait peuplée de 20, voire de 25 millions d'habitants en l'an 2000 en compte en fait entre 17 et 18. La population de Manille, Buenos Aires, Le Caire ou Calcutta a tendance à stagner, voire à décroître.

Libération, 11 novembre 2000

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